Mohssine  Akhrif

Traduit de l’arabe par Mohammed  El  Amraoui

Petits chants
à Jamal Eddine Rachidi

1- Laideur

Les siècles passent
Successivement
mais le visage de la guerre
est  immuable

2- Vision

Je vois une lune
qui coule
telle une veine
pendant  l’éclipse du soleil

3- Chute

Le temps tombe
de l’horloge

4- Archaïsme

Dans un va-et-vient
encore ici
des rétrogrades
portent d’énormes livres anciens

5- Conviction

Ils vont certainement te crucifier
ô ma patrie

6- Dénégation

Vraiment, je ne savais pas
que ton chuchotement
m’emplissait de bruit

Une autre élégie

Ils ont dit : elle est morte
J’ai dit : non… sûrement pas
Et deux larmes sont tombées sur la table
ou sur le cercueil
Ils ont dit : elle est morte
J’ai dit : non
Et deux roses ont poussé sur la table
ou sur le cercueil
Ils ont récité l’Ouvrante et sont partis
Je suis resté seul avec la tombe et l’écho de l’Ouvrante
Ils ont dit : elle est morte
J’ai dit : non… sûrement pas
Ils ont dit : elle est morte
J’ai dit : ah ! Quelle tristesse !

2

Je mets l’épitaphe
qui pleure ton nom
comme oreiller

3

Ils ont dit aussi :
une poignée de lumière
a éclairé ton corps nu
pendant sa traversée
vers le blanc

4

Ils ont dit aussi :
tu donneras la vie à un linceul
et à une épitaphe
sur laquelle ton nom a été gravé
avant que tu t’endormes
pour que tous les saints du pays te rendent visite

5

Seules
les sauterelles accompagnent les morts
elles seules
leur font écouter le chant de la vie

6

Les rires tombent
vite
des lèvres, et s’en vont
laissant le lieu de séjour perpétuel
aux soupirs, aux gémissements
et aux tristes chansons
je suis triste,
triste,
ô mère.

7

Ta maison
n’était ni passage ni abri
du vent
ni logis pour le vide
le soleil ne s’y couchait pas
mais l’aurore y pointait
à chaque heure
matin, midi et soir.

Innocence

Le petit garçon
a laissé seul son jouet
Et seule la balançoire
Oscille, tandis que la branche de l’arbre,
épuisée,
ne peut plus remuer
et le vieux pont
ne peut plus supporter
le piétinement des passagers nocturnes
ni même le chatouillement de l’eau
qui coule en dessous

Assassinat

Quand le coucher annonce
la mort du jour
et l’aube la mort de la nuit
midi et minuit
annoncent mon assassinat
tu ouvrirais alors tes fenêtres
tu resterais à attendre
l’arrivée du loup
tandis qu’en toi le hurlement
changerait les cellules en steppes
et le cœur en moutons,
moutons voulant le loup comme berger.

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