Par Nazik Al-Malaïka

« Maman », et puis le râle, le sanglot, le noir.
Le sang coule encore un peu, le corps poignardé frissonne encore un peu.
Les cheveux bouclés s’enlisent dans la boue
« Maman », mais ça, seul l’a entendu le bourreau.
Demain c’est l’aube, et les roses au réveil,
On entendra crier vingt jeunes années, et l’espoir enchanté.
Alors dira la prairie, et diront les fleurs
- Celle qui vous a quittés, vous a quittés pour que la honte soit lavée.
Dans son village, reviendra le bourreau sauvage.
« La honte ? » dira-t-il et il essuiera son couteau.
« La honte, nous l’avons déchirée en mille morceaux !
Nous voici revenus, sans tache, le front haut, libres.
Eh patron ! Un verre ! Du vin !
Appelle la putain, la langoureuse au souffle de parfum.
Pour rançon de ses yeux, je donne le Coran, et Dieu sait quelles destinées ! »
- Remplis ton verre, bourreau.
La honte, seule la victime peut l’effacer !
L’aurore viendra. Les filles demanderont :
« Où est-elle ? » La bête de sang répondra :
« Nous l’avons tuée ».
Cette tache, à nos fronts, nous l’avons lavée.
Les voisines raconteront son histoire.
Et aussi les palmiers du quartier.
Pas une porte de bois n’oubliera,
Les pierres répèteront :
- Laver la honte,
- Laver la honte,
Ô voisines, filles du village,
Nous ne pourrons pétrir le pain qu’avec nos larmes.
Nous couperons nos tresses, écorcheront nos mains,
Afin que reste pure et blanche la tunique virile.
Ni sourire, ni fête, ni regard : le couteau nous guette
dans la main de nos pères, de nos frères.
- Qui sait, quels déserts, demain,
Pour laver la honte,
Nous enseveliraient ?

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